Histoires

Karine Nadeau

Karine Nadeau

Être plus forte pour aller plus loin

Karine NadeauToute personne accomplissant les exploits décrits dans ce récit mérite l’admiration.

En 2002, Karine Nadeau vit en Alberta avec son conjoint. « Nous avons déménagé dans l’Ouest pour le travail, mais aussi, parce que nous adorons le plein air. L’endroit est un paradis pour les amateurs de randonnées et de sports en montagne comme nous. C’était parfait. »

Malheureusement, la relocalisation ne se déroule pas comme prévu. « J’avais seulement 29 ans et je ressentais des douleurs anormales au niveau de mes épaules. Les traitements constants auprès de chiropraticiens et de physiothérapeutes ne semblaient pas régler la situation. Quelque chose clochait. »

Karine souffre de polyarthrite rhumatoïde. La douleur aux épaules se propage jusqu’aux coudes et aux poignets, puis atteint les genoux et les hanches.

Ses nombreuses crises douloureuses durent parfois plus de 24 heures. Un scénario effrayant qui force le couple à revenir s’établir au Québec. À leur grand chagrin.

« C’était tellement dur pour moi. Pendant plusieurs années, je n’arrivais même pas à regarder des photos de l’Ouest. La perte de mes activités sportives me faisait trop de peine ».

Karine est cependant bien traitée. La prise de méthotrexate la soulage énormément. Grâce à une diminution considérable de ses symptômes dus à la bonne médication, l’avenir semble soudainement plus positif. Le couple donne naissance à son premier enfant en 2003, puis à trois autres entre 2007 et 2012. Les grossesses se déroulent bien, mais créent malgré tout un casse-tête pour la jeune mère, puisque la combinaison médication, grossesse et allaitement ne font guère bon ménage.

Le vent tourne pour elle en 2010, alors qu’après de nombreuses années où la gestion du poids était devenue plus ardue par l’abandon de l’activité physique, elle décide de pratiquer la course à pied. « J’ai commencé tout doucement, un petit deux minutes à la fois, et j’ai allongé la distance, tranquillement. Au début, j’avais une gêne de courir dans les rues. »

En l’espace de quelques années, elle devient une coureuse aguerrie qui franchit de longs parcours. Les quelques kilomètres sont devenus des demi-marathons, puis en 2015, Karine franchit la ligne d’arrivée de son premier marathon entier. Quel sentiment enivrant !

L’histoire pourrait se terminer ainsi et nous conviendrions que la détermination dont fait preuve Karine est tout aussi inspirante qu’exceptionnelle.

Mais son aventure ne se termine pas ici.

Déterminée, revigorée et ambitieuse de repousser constamment ses limites, Karine débute la course en montagne. Les parcours sont vertigineux. En effet, il s’agit de distances hallucinantes de 65 km, puis 125 kilomètres qu’elle franchit, fracassant les limites de son endurance.

En août 2019, Karine entreprend l’Ultra Trail Mont-Blanc (UTMB), avec son conjoint. L’UTMB est un parcours montagneux de… 170 km sur 10 000 m de dénivelé positif !

Ce parcours est réservé aux amateurs et professionnels et le simple fait d’être sélectionnée pour y participer est un exploit en soi. Entre le départ et l’arrivée, 45 heures s’écoulent. Karine ne s’arrête qu’aux postes de ravitaillement prévus à cet effet, pour des durées d’en moyenne 5 à 30 minutes, afin de soigner les ampoules, fermer les yeux et bien s’alimenter.

À un certain moment, la course devient un défi d’ordre psychologique plus que physique. Quand le corps devient endolori, qu’il ne veut plus suivre, qu’il s’écrie vouloir arrêter, c’est à ce moment que Karine sait faire preuve d’une volonté de fer et d’une concentration inébranlable. Cela lui permet de franchir le prochain kilomètre, puis le suivant, jusqu’au fil d’arrivée.

Dans son quotidien, elle aborde la douleur causée par l’arthrite de la même façon que lors de ses parcours abracadabrants.

« La douleur ne fait pas partie de moi. Elle m’est extérieure. Je pratique des exercices de visualisation et de respiration qui me sont utiles lors des moments difficiles. La douleur arrive et repart. »

Bien qu’elle accepte aujourd’hui sa condition, elle a dû apprendre à demander de l’aide, être humble et s’ouvrir aux autres. Vous aurez deviné qu’une femme forte comme elle pourrait avoir tendance à tout prendre de front.

Mais grâce au soutien de sa famille et amis, sa maladie ne l’arrête pas. Loin de là. Certains pourraient même dire qu’elle l’aura rendue plus forte.