Gérer l’arthrite

Orientation sexuelle, identité de genre et expression de genre dans la recherche sur l’arthrite

Orientation sexuelle, identité de genre et expression de genre dans la recherche sur l’arthrite

L’arthrite peut frapper des personnes de tous les groupes d’âge. Cependant, certaines communautés connaissent des taux accrus d’arthrite et pourraient se heurter à certaines barrières plus importantes que d’autres pour obtenir des soins adéquats. Selon le rapport sur les principales inégalités en santé au Canada (2018), les femmes lesbiennes âgées de 18 à 59 ans sont 1,5 fois plus susceptibles d’être atteintes d’arthrite que les femmes hétérosexuelles (16,5 % comparativement à 10,9 %), tandis que les adultes bisexuels sont 1,4 fois plus susceptibles de l’être que leurs homologues hétérosexuels (13,3 % comparativement à 9,2 %). Les raisons restent floues et des études plus approfondies restent à faire. Comme l’indique le rapport : « Le fardeau disproportionné de l’arthrite dans certains groupes est dû à un système complexe de facteurs sociaux et structurels de la santé qui n’ont pas encore été pleinement explorés et entièrement compris. »

En plus d’une incidence accrue de l’arthrite pour certains groupes, une personne peut également rencontrer des barrières au sein du système de santé en raison de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou l’expression de genre (OSIGEG). Ces barrières peuvent inclure un manque de recherches et de connaissances sur la façon optimale de répondre aux besoins de santé des personnes LGBTQIA2S+, ainsi que d’autres barrières structurelles. Le Dr Alan Zhou, médecin résident en médecine interne à l’Université d’Ottawa et futur médecin résident en rhumatologie à l’Université de Toronto, ainsi que Richard Henry, Ph. D., chercheur postdoctoral à la Faculté de médecine de l’Université McGill et à l’Institut Lady Davis pour la recherche médicale de l’Hôpital général juif et membre du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs (GECSSP), sont deux chercheurs qui travaillent actuellement à approfondir leur compréhension des répercussions sur les patients dont les OSIGEG doivent être pris en considération et qui sont atteints d’arthrite et de maladies rhumatismales.

La Société de l’arthrite s’est récemment entretenue avec le Dr Alan Zhou et Richard Henry, Ph. D., pour en apprendre davantage sur leur recherche.

Pouvez-vous nous parler de la recherche que vous avez menée sur l’orientation sexuelle, l’identité et l’expression de genre en lien avec l’arthrite?

Dr Henry : L’un de mes projets actuels porte sur l’examen des lignes directrices existantes en matière de soins de santé primaires afin de déterminer dans quelle mesure elles sont inclusives pour les personnes LGBTQIA2S+. Nous nous sommes principalement concentrés sur les lignes directrices canadiennes, mais nous envisageons d’étendre notre étude aux lignes directrices internationales. Ce travail a des implications importantes pour le développement de lignes directrices plus inclusives, notamment celles liées à l’arthrite et aux autres maladies rhumatismales.
 
Dr Zhou : Je travaille sur une étude de la portée qui permettra de cartographier les études de recherche existantes sur les patients LGBTQIA2S+ atteints de maladies rhumatismales. Nos objectifs sont de résumer les résultats cliniques de ces patients, d’explorer les inégalités en matière de santé auxquelles ils sont confrontés et de repérer toute solution existante ou proposée pour atténuer ces inégalités. Il y a un manque de recherches sur les maladies rhumatismales chez les patients LGBTQIA2S+. Notre travail résumera ce que nous savons actuellement afin de mettre en évidence les pistes de recherche futures.

Pourquoi la recherche sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre est-elle importante dans le domaine de la recherche sur l’arthrite?

Dr Henry : Les personnes LGBTQIA2S+ ont des besoins précis en matière de soins de santé qui ne sont généralement pas pris en compte dans les lignes directrices. Par exemple, les patients atteints de lupus présentent un risque élevé de cancer du col de l’utérus. Un homme trans atteint de lupus qui a un col de l’utérus doit donc se soumettre à un dépistage systématique du cancer du col de l’utérus. Comprendre comment l’OSIGEG peut entraîner des répercussions sur des besoins précis en matière de soins de santé contribuera à la création de lignes directrices plus inclusives et mènera à de meilleurs soins.
 
Dr Zhou : L’une des raisons pour lesquelles il existe des inégalités en matière de santé pour les patients LGBTQIA2S+ est que de nombreux fournisseurs de soins de santé n’ont pas l’ensemble des compétences culturelles précises requises pour prendre soin d’eux. Les fournisseurs de soins de santé possédant les compétences culturelles requises jouent un rôle particulièrement important pour les patients atteints d’arthrite et d’autres maladies rhumatismales, car la nature chronique de ces maladies exige une grande collaboration entre le patient et le fournisseur. La recherche sur l’arthrite et les maladies rhumatismales chez les patients LGBTQIA2S+ est donc particulièrement importante pour sensibiliser les fournisseurs de soins de santé.

Actuellement, quelles sont les lacunes?

Dr Henry : Seulement 17 % des lignes directrices en matière de soins de santé primaires que nous avons cernées dans notre étude abordaient les patients LGBTQIA2S+ et un pourcentage encore moindre comprenait des recommandations précises. Par exemple, les lignes directrices sur le dépistage du cancer du sein se réfèrent généralement aux femmes cisgenres et n’abordent pas les hommes trans qui présentent un risque similaire de développer un cancer du sein s’ils n’ont pas subi d’opération de réassignation sexuelle. Par conséquent, les hommes trans sont moins susceptibles de subir un dépistage du cancer du sein que les femmes cisgenres. Dans l’ensemble, le manque de représentation des personnes LGBTQIA2S+ dans les lignes directrices cliniques s’est traduit par une compréhension limitée, chez les fournisseurs de soins de santé, des besoins précis des patients LGBTQIA2S+ en matière de soins de santé, ce qui a entraîné des lacunes dans la prise en charge des patients LGBTQIA2S+.

Comment votre recherche pourrait-elle contribuer à l’amélioration des soins en matière d’arthrite pour les communautés LGBTQIA2S+ à l’avenir?

Dr Zhou : Les travaux de Richard Henry, Ph. D., ont mis en évidence le manque de représentation des personnes LGBTQIA2S+ dans les lignes directrices cliniques en matière de soins de santé primaires. Notre étude de la portée vise à combler cette lacune en matière d’arthrite et de maladies rhumatismales. Ce travail fait partie d’un projet plus vaste sur la diversité et l’inclusion dans la polyarthrite rhumatoïde, dirigé par la Dre Cheryl Barnabe, rhumatologue pour adultes à Calgary et titulaire de la chaire de recherche du Canada sur la polyarthrite rhumatoïde (PR) et les maladies auto-immunes. Dre Barnabe a déjà publié des articles sur les expériences directes de certaines populations prioritaires confrontées à des inégalités dans les soins de la PR (Pianarosa et al., 2021), et elle étend actuellement ce travail pour se concentrer sur les expériences directes des patients LGBTQIA2S+ atteints de PR.

Quels sont vos espoirs pour l’avenir de la recherche sur l’arthrite pour les communautés LGBTQIA2S+?

Dr Henry : L’espoir est qu’en comprenant les barrières uniques que les patients LGBTQIA2S+ doivent affronter en matière de soins de santé, nous serons mieux équipés pour produire des lignes directrices cliniques de haute qualité pertinentes pour les patients LGBTQIA2S+. En fin de compte, cela aidera les fournisseurs de soins de santé à proposer à ces patients des soins dont la qualité sera améliorée.
 
Dr Zhou : Outre les futures lignes directrices cliniques plus représentatives pour les patients LGBTQIA2S+, nous prévoyons d’utiliser les connaissances acquises dans le cadre de notre recherche pour produire du matériel éducatif à l’intention des fournisseurs de soins du domaine de l’arthrite au Canada.
 

https://www.jrheum.org/content/48/12/1793.abstract (en anglais)
Rapport sur les principales inégalités en santé au Canada